Le CBD, cette molécule que l’on voit partout – en boutique, en pharmacie, parfois même en institut de beauté – continue de soulever bien des questions. Est-il légal ? Dans quelles conditions peut-on le vendre ? Et surtout… est-ce que la loi pourrait changer bientôt ?
Ce qu’il faut comprendre, c’est que le cadre légal du cannabidiol (CBD) en France reste un sujet mouvant, entre décisions européennes, jurisprudences françaises, projets pilotes et débats parlementaires. On vous explique tout ce qu’il faut savoir.
Ce que dit la loi aujourd’hui sur le CBD
Commençons par le plus simple : le CBD est légal en France, mais à certaines conditions très précises.
👉 La principale limite, c’est celle du THC (tétrahydrocannabinol), la molécule psychoactive du cannabis. Un produit contenant du CBD ne doit pas dépasser 0,3 % de THC pour être autorisé à la vente (ce seuil a été relevé début 2022, il était auparavant de 0,2 %).
👉 Seules les variétés de chanvre autorisées par l’Union européenne peuvent être utilisées.
👉 Les graines et les fibres sont librement exploitables.
👉 Mais – et c’est là que ça coince – la vente des fleurs brutes reste interdite, même si cette interdiction a déjà été suspendue par le Conseil d’État en janvier 2022 (décision n° 460055).
Pourquoi autant de flou ? Parce que le CBD, bien qu’inoffensif et non psychotrope, reste lié juridiquement au cannabis. Or, en France, le cannabis est considéré comme un stupéfiant, ce qui complique la donne.
Pourquoi certaines villes testent une autre approche
Face à cette législation jugée “trop rigide” par de nombreux acteurs, certaines villes ou régions aimeraient faire bouger les lignes. Comment ? En lançant des expérimentations locales.
🔬 Genève : le cannabis en vente en pharmacie
À Genève, en Suisse, une expérimentation encadrée va débuter en décembre. Il sera possible d’acheter du cannabis à moins de 1 % de THC dans une pharmacie agréée (source : Tribune de Genève, 2023).
Objectif ? Observer les effets d’une vente contrôlée sur les habitudes de consommation, la santé publique… et le marché noir.
🌱 Bègles : un maire qui veut tenter le coup
En France, c’est la commune de Bègles, en Gironde, qui a ouvert la voie. Son maire, Clément Rossignol-Puech, a écrit à Emmanuel Macron pour proposer un test grandeur nature de la vente encadrée de cannabis à usage récréatif. Il espère faire reculer les trafics et réduire la consommation chez les plus jeunes (source : BFMTV, 2023).
🧪 Nouvelle-Aquitaine : vers un “laboratoire” de légalisation ?
Plus largement, certains élus de Nouvelle-Aquitaine militent pour que la région devienne un territoire d’expérimentation. Pour eux, la législation actuelle montre ses limites : elle ne réduit pas le trafic, freine l’innovation, et empêche une régulation de qualité (source : France 3 Régions).
Quelles pistes pour mieux encadrer la vente de CBD ?
Le flou juridique actuel n’est ni tenable pour les commerçants, ni rassurant pour les consommateurs. Plusieurs axes de réforme sont donc évoqués.
📚 Clarifier une bonne fois pour toutes la loi
Aujourd’hui, de nombreux vendeurs de CBD en France naviguent à vue. Entre les textes européens, les décisions de justice, et les arrêtés temporaires, rien n’est vraiment stable.
Certains professionnels réclament une clarification du cadre légal, pour éviter les fermetures abusives de boutiques, les saisies injustifiées et les poursuites mal fondées.
👉 Une demande relayée par le Syndicat professionnel du chanvre, qui plaide pour un cadre clair, juste et appliqué de manière homogène.
🌼 Autoriser (enfin) les fleurs de CBD ?
Autre sujet brûlant : l’interdiction de vendre des fleurs de CBD.
Le Conseil d’État a déjà suspendu cette interdiction en 2022, considérant qu’elle n’était pas justifiée sur le plan de la santé publique, tant que les fleurs contiennent moins de 0,3 % de THC.
Pourtant, la commercialisation reste risquée, car aucune loi définitive ne l’autorise pleinement. Un assouplissement législatif permettrait à la filière française de se développer, tout en garantissant des contrôles stricts sur la qualité.
🧪 Multiplier les projets pilotes
Enfin, plusieurs experts et élus appellent à tester différents modèles de régulation, à petite échelle. L’idée ? Collecter des données réelles, comparer les effets selon les zones, et adapter ensuite la loi au niveau national.
Ce type d’approche “par le terrain” est encouragé par de nombreux chercheurs en santé publique et spécialistes des politiques addictives, comme le sociologue Michel Gandilhon, chercheur à l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), qui évoque régulièrement « l’échec du tout-répressif » et l’intérêt des modèles alternatifs supervisés.
Le CBD en France : vers un changement inévitable ?
Ce qui se dessine en toile de fond, c’est un virage progressif. Même si le CBD reste aujourd’hui légal sous conditions, les lignes bougent.
➡️ Les boutiques se multiplient, malgré les incertitudes
➡️ Les consommateurs s’informent davantage
➡️ Les élus commencent à relayer les demandes du terrain
La France regarde de près ce qui se passe chez ses voisins (Suisse, Luxembourg, Allemagne…), et certains signes laissent penser que le débat pourrait bientôt s’élargir à l’Assemblée nationale.
Une chose est sûre : les Français veulent du cadre, pas du flou. Et surtout, ils veulent pouvoir accéder à des produits de qualité, sûrs, bien contrôlés, et sans risquer des poursuites absurdes pour un flacon d’huile ou une tisane.